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Venise : façades typiques |
Au cours du mois italien d'Eimelle, en Octobre, Albertine a publié un billet sur les instants parfaits vécus en Italie que vous pouvez lire ICI :
"Dans la vie, il y a des "instants parfaits" où l'on se sent pleinement exister, animé de l'idée qu'on est exactement au bon endroit au bon moment. L'Italie est le pays qui m'a offert le plus de ces parenthèses enchantées, de celles que la mémoire peut reconstituer dans les moindres nuances. Je vous en dévoile un, et puis ce sera votre tour..."
Je me suis souvenue avoir rédigé un texte sur le même thème; il a disparu de mon blog à l'occasion de son transfert. Certes, il s'agit de prose mais j'espère que Asphodèle l'acceptera pour son jeudi poétique; elle, qui nous a demandé de rédiger nous-mêmes notre texte pour Jeudi 12 Novembre.
"Dans la vie, il y a des "instants parfaits" où l'on se sent pleinement exister, animé de l'idée qu'on est exactement au bon endroit au bon moment. L'Italie est le pays qui m'a offert le plus de ces parenthèses enchantées, de celles que la mémoire peut reconstituer dans les moindres nuances. Je vous en dévoile un, et puis ce sera votre tour..."
Je me suis souvenue avoir rédigé un texte sur le même thème; il a disparu de mon blog à l'occasion de son transfert. Certes, il s'agit de prose mais j'espère que Asphodèle l'acceptera pour son jeudi poétique; elle, qui nous a demandé de rédiger nous-mêmes notre texte pour Jeudi 12 Novembre.
Voici deux instants parfaits à Venise, une ville qui a vite fait de vous retourner le coeur et la tête et de vous emporter au loin. Mais il y en a bien d'autres, je pourrais être intarissable sur ces instants priviligiés en Italie et vous?
Le nouveau Monde (1961)
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Venise : un canal |
Le premier souvenir remonte à mon adolescence et à ma première visite à Venise. Le soir de notre arrivée, ma mère et moi, nous partons vers la place San Marco. Nous sommes logées loin du centre, près de la gare, et nous prenons plaisir à nous perdre dans ces ruelles qui s'arrêtent brusquement sur des corti, petites places presque fermées sur elles-mêmes, ou sur des campielli à la Goldoni avec leurs maisons aux crépis rouges ou ocres qui s'effritent, leurs façades qui regardent vers l'intérieur, leurs hautes cheminées à la Carpaccio. C'est un véritable plaisir, ce cheminement dans ces petites calli obscures qui s'étranglent et qui de solides se terminent en chemins liquides. Et puis cette succession de ponts en dos d'âne qui nous transforment en petits chèvres des montagnes, escaladant, descendant, encore et encore!
Mais rien, aucune photographie, aucun film, aucun récit, rien, ne peut préparer à la rencontre d’une telle beauté quand on débouche pour la première fois sur la place San Marco. Dans la semi-obscurité qui peu à peu enveloppe la place, les dentelles blanches du palais des Doges, les scintillements des mosaïques d’or de la cathédrale, les lignes élancées du campanile s'estompent doucement. Les lumières dorées qui éclairent les élégantes arcades des constructions entourant la place prennent le relais. La Piazza brille d’un éclat étrange, plein d'attente. Sur une estrade, au milieu de la place, un orchestre symphonique donne un concert d’été ouvert à tous. La foule est dense. Certains restent debout, recueillis, d’autres s’assoient à même le sol... une émotion ressentie par tous tandis que se déroulent les thèmes de La Symphonie du Nouveau Monde. La musique se déploie, monte jusqu'au ciel noir au-dessus de la Place de lumière et de la marée humaine qui observe un silence attentif. Par la suite, lorsque j’écouterai la musique de Dvorjak, ce ne sont pas les images des grands espaces du Nouveau Monde qui surgiront devant mes yeux. Ce sont les ors chauds de la Piazza San Marco qui viendront à moi et le sentiment éprouvé alors de beauté parfaite, partagé par chacun d’entre nous dans la magie de ce lieu.
Une fillette sous la pluie (1981)
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Venise: place Saint Marc la nuit source |
Des années plus tard quand je reviendrai à Venise avec mon mari et Aurélia, ma fille âgée de 4 ans, se reproduira un instant de grâce comme seule la Piazza peut nous réserver. Ce soir-là, il pleut. L’immense place est déserte, les promeneurs se sont réfugiés sous les arcades. Ils regardent la pluie, patiemment. Discussion, brouhaha... Les orchestres des cafés du Quadri et du Florian jouent sans conviction quelques airs languissants. Mezzo Voce... Attente. La pluie scintille sur le sol dallé qui devient miroir et reflète les lumières qui parent les arcades des Procuratie Vecchie de feux tremblotants. Soudain, Aurélia s’élance, petite elfe minuscule sur l'immense place et commence à danser; elle tournoie sur elle-même, les bras écartés, la tête levée vers le ciel, heureuse. Les musiciens la voient, s’animent et entament une valse de Strauss, vive, légère. L'enfant suit le rythme, valse, valse, se grise de liberté et de musique. Les gens s’arrêtent de parler, la montrent du doigt et tous observent, silencieux, avec un sourire amusé, la jolie fillette blonde vêtue d’un ciré bleu, qui virevolte sur la place mouillée dans un ruissellement d'ors et de lumières.
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Venise : café du Florian |
Pour le challenge italien d'Eimelle il Viaggio dites-nous quels instants parfaits vous avez vécus à Venise ou ailleurs en Italie. Alors, qui se lance?